Premier exportateur mondial, avec des exportations qui ont presque doublé au cours de la décennie écoulée, pour atteindre 22,2 milliards d’euros en 2024, en hausse de 6,8%, l’industrie française des cosmétiques est particulièrement exposée à l’éventualité d’une guerre commerciale.

Au premier rang des inquiétudes figurent évidemment les menaces de guerre commerciale formulées par le président américain Donald Trump.

Sur ce marché à la consommation dynamique, la France a su maintenir ses parts de marché. Les États-Unis sont aujourd’hui le premier importateur de cosmétiques français après l’Union européenne. Les velléités protectionnistes de ce partenaire commercial stratégique suscitent donc une inquiétude légitime.

Droits américains : trois scénarios

« La situation est toutefois incertaine », insiste Sylvain Bersinger, chef économiste chez Asterès, auteur pour la Cosmetic Valley d’une étude sur les risques et opportunités du contexte économique mondial actuel pour les exportations françaises de cosmétiques. « Compte tenu des déclarations contradictoires de Trump et de son entourage, il est très difficile d’anticiper avec fiabilité la réalité de ce que sera la politique commerciale des États-Unis », explique-t-il.

Asterès envisage donc trois scénarios selon la politique douanière que l’administration étatsunienne pourrait adopter.

Le premier scénario envisage l’instauration de droits de douane généralisés, qui s’appliqueraient à l’ensemble des produits importés aux États-Unis, avec un taux fréquemment mentionné de 10%. Dans cette hypothèse, selon Asterès, les effets de change, l’inflation et une hausse probable des taux d’intérêts, neutraliseraient les effets de la politique douanière américaine. L’impact sur les exportations françaises de cosmétiques serait donc limité.

Le second scénario étudie l’éventualité de mesures ciblées contre les cosmétiques français, une hypothèse qui n’a pas été évoquée publiquement à ce jour. Pour l’industrie des cosmétiques, ce serait le pire des cas, estime Asterès. En effet, une hausse ciblée ne serait que faiblement rééquilibrée par les mécanismes macro-économiques, des mesures de rétorsion ciblant des produits américains emblématiques seraient probablement adoptées, mais l’impact de court terme sur les exportations françaises pourrait être significatif.

Enfin, le troisième scénario est celui d’une situation qui dégénèrerait en guerre commerciale. Le risque est que les mesures de rétorsion se multiplient et que les mesures protectionnistes se généralisent. « On entrerait dans un autre monde qui changerait totalement le cadre connu et mis en place depuis la seconde guerre mondiale », indique Sylvain Bersinger.

Fleuron français reconnu, la cosmétique pourrait être une cible privilégiée dans le cadre de conflits commerciaux, généralisés ou non, comme le sont souvent les produits emblématiques d’un pays.

« Les inconnues sont nombreuses et nous observons l’évolution de la situation sans sentiment de panique. Nous avons des atouts, les exportations cosmétiques françaises sont plutôt centrées sur le haut de gamme et le luxe. Sur ces segments, il y a une certaine indifférence aux tarifs douaniers », rassure Marc-Antoine Jamet, président du pôle de compétitivité Cosmetic Valley.