En tant que Présidente du 35e congrès de l’IFSCC, qu’attendez-vous de cet événement ?
Dr. Christine Lafforgue - Je crois que le but est de démontrer que les cosmétiques sont intimement liés à la fonction biologique de la peau, des cheveux etc. et donc à la science. Or ils revêtent de nombreuses spécificités — texture, couleur — à l’origine d’une grande complexité.
Nous allons donc explorer cette diversité et cette complexité sous tous les angles, biologiques, chimiques, physiques, IA, et découvrir les techniques de recherche les plus récentes qui permettent d’avancer, de perfectionner la formulation au service d’une cosmétique intelligente, en quelque sorte, dans sa capacité à réconcilier le bien-être biologique de la peau et/ou des cheveux, et le bien-être global.
Cela demande beaucoup de créativité. Les intervenants des trois sessions non conventionnelles nous aideront ainsi à penser « out of the box ».
Au total, 68 podiums et 650 posters sont prévus. Vous avez reçu près de 1200 candidatures. Comment se répartissent-elles ?
Dr. Christine Lafforgue - Toutes les régions du monde sont représentées, démontrant ainsi la dynamique de la recherche cosmétique mondiale.
Nous observons aussi que plusieurs propositions sont le fruit de collaborations internationales, entre acteurs d’horizons différents. Ce qui est marquant également, c’est le poids de la France dans la zone EMEA. Elle reste numéro 1 dans les propositions de travaux de recherche au niveau de l’Europe, tandis que le Brésil est très dynamique sur la zone Amériques, à l’instar de la Chine, du Japon et de l’Indonésie sur la zone Asie.
Comment se fait la sélection ?
Dr. Christine Lafforgue - Les critères retenus sont la nouveauté et l’originalité, l’impact sur l’industrie cosmétique, et la contribution à la connaissance scientifique.
Les 68 premiers abstracts obtiendront un podium, tandis qu’un poster sera proposé aux 650 suivants, qui ont la liberté de l’accepter ou de le refuser. En final, et une fois l’anonymat levé, un arbitrage peut être possible pour assurer l’équité dans la représentativité.
Les trois grands thèmes sont la santé de la peau et des cheveux, les sciences holistiques et la diversité et la personnalisation. Comment les avez-vous définis ?
Dr. Christine Lafforgue - Nous avons fait un tour d’horizon des publications en cosmétologie et identifié les sujets qui ressortaient systématiquement. Nous avons délibérément choisi une définition assez large pour chacun des thèmes, puisqu’après tout, l’objectif est de considérer l’ensemble des travaux pour chacun d’entre eux de manière ouverte et en profondeur.
Lorsqu’on parle de longévité par exemple, cela fait écho à des mécanismes moléculaires, à des recherches biologiques sur des actifs d’intérêt a priori, dont le bénéfice reste d’ailleurs entier à démonter, grâce à la protéomique notamment. Le congrès traite de la science de la cosmétologie, bien en amont de la cosmétique donc, tout en étant à son service. C’est un fait que la cosmétique est de plus en plus performante, objectivable et objectivée grâce à la science, qui soutient ses allégations par des arguments scientifiques.
Qu’entend-on plus précisément par sciences holistiques ?
Dr. Christine Lafforgue - Il s’agit de considérer les travaux de recherche en cosmétologie dans leur ensemble, pas seulement dans la perspective d’un produit cosmétique à définir, mais aussi dans la perspective du contexte de son utilisation ou des pratiques qui l’entourent ou qu’il accompagne.
La médecine esthétique, par exemple, déploie une sorte de protocole avant et après un acte chirurgical, pour une prise en charge à la fois ciblée et générale de l’individu. Le bien-être, au-delà du spécifique, devient incontournable. La cosmétique s’en inspire et la science cosmétologique en étudie les mécanismes.
Quelles perspectives ouvrent-ils ?
Dr. Christine Lafforgue - La présentation des travaux sur ces trois grands thèmes révèle les mécanismes et les interactions qui les gouvernent sur un plan scientifique avec toujours plus de finesse, pour plus de performance et de sécurité. C’est essentiel. Ils nous amènent à comprendre la limite de certains mécanismes et permettent donc de formuler des produits cosmétiques plus justes, mieux ciblés, avec un périmètre bien d’action maitrisé.
Que voulez-vous dire aux cosméticiens ?
Dr. Christine Lafforgue - Ce 35e congrès à Cannes est une grande chance en termes d’accessibilité pour tous les acteurs de la science en cosmétologie européens en particulier, sachant que c’est un événement mondial, auquel participeront des scientifiques d’Asie et d’Amérique. Le précédent était au Brésil et le prochain sera en Australie ! Par ailleurs, le congrès cède une large place aux échanges entre pairs pour réseauter et identifier des synergies possibles.
L’IFSCC est une fédération scientifique mondiale qui réunit près de 16 000 membres, parmi lesquels des biologistes, des chimistes, des physiciens, des formulateurs, des acteurs académiques ou industriels scientifiques de très haut niveau. C’est une occasion rare à ne pas rater, qui plus est en dans un cadre magnifique.
La version complète de cette interview a été publiée dans notre numéro spécial Ingrédients Cosmétiques, publié en avant-première du salon in-cosmtics Global 2025. |
Plus d’informations sur l’IFSCC 2025 sur : ifscc2025.com