En résumé — pour les bienheureux qui, revenant de vacances reposantes et déconnectées, auraient manqué ce marronnier des magazines conso — l’Institut national de la consommation a mis au point un indice agrégé supposé permettre la comparaison de différents produits cosmétiques selon leur impact pour la santé (70% de la note) et pour l’environnement (30%). Ce « Cosméto’Score » a de quoi faire pâlir de jalousie les évaluateurs de la sécurité les plus chevronnés tant il est à la fois simple et précis !
Pour aller plus loin que les applications, l’INC indique toutefois ne pas se contenter de lire la liste des ingrédients mais explique également tenir compte de leur importance dans la composition (mais - et c’est un problème - sans connaître leur concentration exacte), de l’usage du produit (rincé ou non, quotidien ou non…) et de leur récurrence dans notre quotidien… Sur cette base, les produits sont notés sur une échelle de A « sans réserve d’utilisation » à E (« utilisation fortement déconseillée, produit contenant trop de substances problématiques »). On notera d’ailleurs que 60 Millions de Consommateurs s’apprête à développer sa propre application d’évaluation des cosmétiques, produits ménagers et aliments : Mon Assistant Conso. Ceci expliquant peut-être cela.
86 produits testés
Pour promouvoir son nouvel indice (et probablement faire fonctionner sa future application), l’INC a appliqué le Cosméto’Score à un échantillon de 86 cosmétiques : gels et crèmes de douche, crèmes hydratantes, mousses à raser, dentifrices, vernis à ongles et fonds de teint. Bonne nouvelle, nous indique l’Institut, « dans chaque catégorie ou presque se trouvent des produits notés A » !
Mais il n’y aurait pas de quoi faire couler autant d’encre si l’étude ne livrait pas aussi son lot de produits mal classés. Ainsi, nous apprend 60 Millions de Consommateurs, certains produits de douche, de marque Carrefour, Dop et Weleda, contiennent de la coumarine (2H-1-benzopyran-2-one), une molécule parfumante figurant dans la liste des allergènes à déclaration obligatoire et qui, nous dit la revue, est aussi « suspectée d’être cancérogène-mutagène-reprotoxique », sans qu’il soit précisé dans quelles conditions.
De même, une crème Dove testée par le magazine contient du Lilial (butylphényl méthylpropional ou BMHCA), un ingrédient parfumant également classé parmi les 26 allergènes dont l’étiquetage est obligatoire au-delà d’une certaine concentration. Cet ingrédient serait, selon le magazine, « toxique pour la reproduction ». De fait, le dernier avis du SCCS du 10 mai 2019 pointe de possibles risques dans le cas d’une exposition à de multiples sources (plusieurs produits contenant la substance). La réglementation étant ce quelle est (c’est à dire rigoureuse), les jours de cet ingrédients semblent comptés.
Enfin, 60 Millions de Consommateurs épingle certains dentifrices pour la présence de traces de métaux lourds, comme le zinc et l’étain, ou la présence de dioxyde de titane, qui « peut contenir des nanoparticules et est soupçonné d’être cancérogène ». Difficile, à partir des données fournies par la revue, de se figurer la réalité d’un risque qui semble très hypothétique.
« Ne pas affoler les gens »
On peut s’interroger sur la pertinence d’une échelle prétendant résumer à la fois le risque sanitaire et le risque environnemental de produits par ailleurs soumis à l’obligation d’une évaluation de sécurité par des professionnels qualifiés et selon des méthodes rigoureuses. « Il ne faut pas affoler les gens », précise d’ailleurs à l’AFP la chef de la rubrique Santé - Cosmétique du magazine, Adelaïde Robert, « en cas de risque avéré et immédiat pour la santé on n’aurait pas ces produits sur le marché ». Nous voici rassurés ! Mais alors, pourquoi tout ce tintamarre ?
« L’idée de ces évaluations, c’est de pousser les industriels à faire mieux, parce qu’on voit bien que dans chaque famille de produits, il y en a qui s’en sortent bien », en proposant des produits expurgés de ces ingrédients problématiques, explique Mme Robert.
Pour la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), qui représente les entreprises cosmétiques, ce « CosmetoScore » qui mélange les données sur la santé, sur l’environnement, sur les allergènes (qui ne concernent par définition que les rares personnes allergiques à un ingrédient), sur les mauvais usages (aérosols inflammables... ) génère surtout de la confusion et une inutile anxiété dans l’esprit des consommateurs.
« Le débat sur la composition des produits est toujours légitime, en cosmétique comme pour tous les autres produits de consommation. En revanche, inquiéter le consommateur avec des indicateurs fourre-tout, forcément anxiogènes, n’est pas la bonne méthode », affirme Patrick O’Quin, le Président de la FEBEA.
La FEBEA rappelle une fois de plus les exigences très élevées de la réglementation cosmétique européenne, « la plus stricte au monde ».
« Tous les produits cosmétiques mis sur le marché en France sont donc sûrs, autorisés et contrôlés », rappelle Patrick O’Quin. « Les fabricants de produits cosmétiques ne se contentent pas de se conformer à la réglementation : ils réalisent aussi en permanence des efforts considérables de R&D pour développer des produits toujours mieux tolérés, plus efficaces et respectueux de l’environnement ». En conclusion « il est essentiel de faire confiance à la réglementation, édictée et contrôlée par nos autorités compétentes ».