Connu et exploité depuis l’Antiquité pour ses qualités aromatiques, l’encens est indissociable de l’histoire de la parfumerie et intimement lié à celle des civilisations du Proche et Moyen-Orient. C’est aussi un ingrédient clé des parfums d’Amouage, une substance en phase avec l’intérêt croissant pour les ingrédients naturels et les savoir-faire artisanaux ancestraux.

Initiative patrimoniale

L’aventure remonte à 2022, quand Amouage s’engage aux côtés du Ministère du Patrimoine et du Tourisme d’Oman pour relancer la filière de l’encens dans le sultanat. Dans la foulée, la marque a acquis des terres dans la région de Wadi Dawkah, un site classé au Patrimoine Mondial de l’Unesco, afin d’y cultiver les arbres producteurs de la précieuse résine.

La marque s’est alors entourée de nombreux partenaires : l’Environment Society et le Jardin botanique d’Oman, ainsi que de deux experts de l’approvisionnement durable, le parfumeur Pierre Négrin, d’une part, et le spécialiste du sourcing d’ingrédients de parfumerie, Dominique Roques, d’autre part. Pour ce projet, Amouage s’est également associée à la maison de composition dsm-firmenich, reconnue pour son expertise du naturel.

Pour Renaud Salmon, Directeur de la Création chez Amouage, l’implication de parfumeurs dans le projet est une force. « Ils ont conscience de ce qu’apporte cette nouvelle essence à la palette d’ingrédients », analyse-t-il.

De fait, cette variété omanaise met en lumière l’aspect fusant, vertical et vibrant de l’encens. Avec un effet pétillant qui peut évoquer celui des agrumes ou des baies roses, auxquels elle offre une véritable alternative, car elle est en outre plus tenace. En dilution à 10%, l’essence dévoile aussi des nuances aldéhydées.

Traçabilité complète

Afin de proposer un produit traçable, Amouage a établi une cartographie des arbres. Chaque arbre est répertorié, son état de santé est vérifié et accessible via un code QR.

L’encens du Wadi Dawkah est traçable mais aussi éthique, puisque les récoltes ont lieu tout au long de l’année, permettant ainsi aux communautés locales de vivre durablement de cette ressource. Tous les trois mois, la sève transformée en résine est récupérée sur les arbres. Les “larmes” d’encens sont classées par couleur puis distillées.

De septembre 2023 à mars 2024 a eu lieu la première récolte. « Elle nous a permis de déterminer les périodes de l’année les plus propices à la cueillette. Nous avons identifié les différentes qualités obtenues suivant la zone de récolte. C’est une étape visuelle où l’on évalue la couleur, la taille et l’aspect avant de procéder à l’analyse des composants lors de la distillation et de l’évaluation olfactive », explique Renaud Salmon.

L’huile essentielle d’encens du Wadi Dawkah présentée lors du WPC provient de résines traitées sur le site grassois de dsm-firmenich. À terme, en vue de privilégier un circuit court, les résines seront distillées au sein de l’usine de dsm-firmenich en cours de construction dans la région.

Coût raisonnable

Autre attrait, le coût de cette nouvelle huile essentielle reste raisonnable. « C’est formidable d’employer des ingrédients très onéreux, mais leur dosage se révèle souvent infime dans une formule. Ce qui me séduit ici, c’est de proposer un ingrédient traçable, écoresponsable, dont le prix ne soit pas excessif. Et donc de signer des parfums qui en contiennent en bonne quantité », affirme Renaud Salmon.

Dans un premier temps, Amouage se réserve l’usage exclusif de cette huile essentielle. Toutefois, cette dernière pourrait à terme être commercialisée dans des limites qui restent à définir. « C’est important de trouver l’équilibre entre la qualité et le juste prix de l’ingrédient. Notre vision à long terme, c’est celle d’une matière qui va s’autoréguler en termes d’offre et de demande, pour ne pas mettre trop de pression sur la ressource naturelle, tout en créant de l’emploi via des filières de production à Oman », poursuit le directeur.

Une fois ses besoins nourris, la marque souhaite ouvrir le surplus de production à « de belles maisons, à l’issue d’un dialogue entre créatifs, fournisseurs, parfumeurs, lorsque cette variété d’encens a une raison d’être au sein d’une composition ».

Avec ce partenariat, dsm-firmenich enrichit sa palette naturelle d’une huile essentielle d’encens de très belle qualité, qui pourra être utilisée par des parfumeurs d’autres marques avec l’accord d’Amouage.

« Peu de maisons produisent elles-mêmes une matière pour l’ouvrir ensuite à d’autres marques. C’est une vision nouvelle en quelque sorte, qui traduit notre volonté d’enrichir le marché de créations de qualité et de promouvoir une belle parfumerie. Tout en valorisant le patrimoine d’Oman », souligne Renaud Salmon.

Si le terme est devenu générique aujourd’hui, l’encens (ou oliban) désigne, en réalité, une large variété de résines que sécrètent les arbres Boswellia, largement cultivés dans l’Est du continent africain et dans la péninsule arabique, de la Somalie au Yémen. Or, le site de Wadi Dawkah abrite la plus grande forêt protégée au monde de Boswellia sacra. À travers ce partenariat, Amouage met en lumière ce sanctuaire protégé de l’encens, un des quatre sites historiques de la route de l’encens. Une manière de reconnecter l’histoire millénaire de la résine d’encens avec l’art de la parfumerie contemporaine.